Journée d’hommage à Lamine Dieng
Le 19 juin 2021 à partir de 12h
À la Parole errante / 9, rue François Debergue 93100 Montreuil / Entrée prix libre
Ateliers de formation et de discussion :
– Copwatching
– Théâtre-forum « Se défendre »
– La fabrique du non-lieu
– Violences psychologiques
– Violences pénitentiaires
Sérigraphie (venez avec vos t-shirts)
Cantine
Graff
Initiation à la boxe par l’ASPA
Collage photo avec l’aide du collectif Bon pied, bon œil
Exposition photo
Coin enfants
ll y a quatorze ans, notre fils, frère, oncle, ami, Lamine Dieng succombait à Paris, sous les violences exercées par des policiers.
Depuis, nous, parents, amis et soutiens avons affronté dix longues années de procédures judiciaires pour faire reconnaître la responsabilité des brutalités des agents dans la mort de Lamine. Dix ans pour déboucher sur un non-lieu en 2017… alors que l’asphyxie a été reconnue comme cause du décès. Puis, après 13 ans de lutte, en juin 2020, l’État français reconnaît sa responsabilité à travers une décision de la Cour européenne des droits de l’homme.
Le 17 juin 2007, Lamine avait 25 ans, était en bonne santé et heureux de vivre. Il a perdu la vie dans des conditions atroces, aux mains de quatre policiers. Quatre professionnels garants de la sécurité publique, appelés pour tapage nocturne. Seul, non armé, ne menaçant aucune vie, Lamine Dieng, a été plaqué face contre terre, chevilles sanglées et menottes aux mains, un bras passé par dessus l’épaule et l’autre replié dans le dos, son calvaire a duré une demi-heure au cours desquelles il a été plié et écrasé par plus de 300 kg, correspondant au poids total des policiers agenouillés sur son dos. Après avoir traîné Lamine, entravé, sur le bitume avant de le jeter sur le plancher du fourgon de police, un agent s’agenouille sur sa tête pendant que deux autres compriment son thorax, agenouillés sur ses épaules, un quatrième agent s’agenouille sur les jambes de Lamine, repliées jusqu’au bassin. Le décès de Lamine est constaté trente minutes après l’intervention.
Le 18 juin, la police des polices (IGS) conclut que Lamine Dieng est « mort naturellement d’un arrêt cardiaque, qui pourrait être dû à une overdose de cocaïne et de cannabis ».
Le 22 juin, la famille dépose une plainte avec constitution de partie civile, qui ouvrira une information judiciaire le 10 juillet 2007.
En 2008, l’asphyxie est définitivement reconnue comme cause du décès de Lamine. Les conclusions des expertises médicales sont accablantes : « mort d’une asphyxie mécanique par suffocation, due à l’appui facial contre le sol avec pression du sommet de la tête dans un contexte toxique. » Et les auteurs de ce crime sont identifiés.
La contre-expertise médicale a également relevé plus de 30 hématomes sur le corps de Lamine (de 5 cm sur 3 cm à 7 cm sur 3 cm) du cuir chevelu en passant par les pommettes et jusqu’au menton. Des pétéchies conjonctivales, signe d’une compression violente du cou, une morsure profonde de la langue, un œdème cérébral important qui a mis en péril les fonctions vitales, une plaie à la lèvre, des zones de peau arrachées, des hématomes profonds aux genoux et aux pieds, une cyanose des ongles des doigts et des orteils résultant d’une compression thoracique.
Dix ans d’instruction pour dire qu’il ne s’est rien passé, qu’il n’y a pas matière à poursuivre les tueurs de Lamine Dieng. Selon le magistrat Patrick Gachon, il n’y a pas matière à ouvrir un procès contre celui qui a étranglé Lamine avec sa matraque, ceux qui ont comprimé son thorax, celui qui a comprimé sa tête et celui qui a replié ses jambes jusqu’au bassin. Le juge motive cette décision par le fait que la technique du plaquage ventral n’est pas interdite en France et que les policiers se voyaient en situation de rébellion face à un homme pourtant déjà à terre à leur arrivée. Et ensuite, entravé aux 4 membres.
Trois ans plus tard, la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH), saisie par la famille Dieng en 2018, rend son arrêt sur le meurtre de Lamine, conformément à la Convention européenne des droits de l’homme.
Oui, Lamine avait droit à la vie (art. 2).
Oui, Lamine a subi un traitement inhumain et dégradant (art. 3).
L’État républicain français, pour clore les poursuites à son encontre, a accepté de verser à la famille la légitime indemnisation fixée par la CEDH. Par cet acte, il reconnait (1) que plusieurs de ses agents ont infligé en groupe la mort à un homme non-armé qui ne les menaçait pas, (2) que plusieurs de ses agents ont failli à leur devoir qui était de conduire un procès équitable pour rendre justice.
Oui, Lamine a été massacré par la police et déshumanisé par la justice.
Chronologie judiciaire
2009 : Demande d’actes complémentaires par la partie civile, nouvelle audition des 8 policiers présents sur la scène.
2010 : Les policiers sont placés sous le statut de témoins assistés, leur donnant accès au dossier pour préparer leur défense.
2011 : Refus du juge d’organiser une reconstitution sur la scène de crime, au motif qu’elle ne permettra pas de « restituer l’état d’excitation » de Lamine.
2012 : Confrontation des parties et pseudo-reconstitution… dans le cabinet du juge.
2013 : Refus d’entendre les témoins du meurtre, au motif qu’ils n’apporteront aucun nouvel élément au dossier.
2014 : Le juge d’instruction Patrick Gachon émet une ordonnance de non-lieu pour les 8 policiers mis en cause, après une instruction de 7 ans.
2015 : La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris confirme le non-lieu.
2016 : Attente du pourvoi en Cassation.
24 mai 2017 : Audience devant la Cour de cassation.
21 juin 2017 : Rendu de l’arrêt de la Cour de cassation.
2018 : Dépôt du dossier à la Cour européenne des droits de l’homme.
2020 : Arrêt de la CEDH.
La Parole errante, 9, rue François Debergue, 93100 Montreuil