Son Papillon de nuit

Une création théâtrale de la Cie Le nez dans l’herbe

Prix libre

Pauvre, attendu, le langage traumatique résonne comme une volonté, un désir de se dire. Tracé d’avance, souvent logique, il emprunte à d’autres, il est insuffsant. « Se mentir à soi-même » oppose une vérité informulée, soupçonnée mais tue, à une autre, celle de tous les jours, celle que l’on se raconte. Quelle est la nature de ce mensonge ? Comment s’approcher de cette douleur qui ne se dit pas, qui reste là, tapie au fond des corps ?

Mentir, donc. J’ai choisi de me mentir pour aller au plus proche de la douleur. Sans tenter de la saisir, de la comprendre, sans mots d’emprunt, je me suis appliquée à la faire vivre dans ce qu’elle est. Une réalité mouvante, inscrite dans une durée où passé et présent s’entrechoquent, vissée au corps. J’ai voulu mentir… pour voir. Ainsi est née l’histoire de cette femme victime de violences, à la recherche de sa propre langue. Sans psychologie ou souci de réalisme, j’ai voulu travailler sur les mots, ou plutôt l’absence de mots, sur ce qu’elle ne dit pas. Ce qui se détache d’elle dans cette réalité informe, où se mêlent fgures masculines passées et futures, situations réelles et fantasmées. J’ai voulu parler de sa guérison à travers sa ré-appropriation du langage, d’un autre, du sien, celui qui lui a toujours manqué et qui la empêchée de se défendre.

Travailler sur la douleur passera par le corps. Un corps libre dans un espace changeant, évoluant au gré d’une scénographie d’objets en mouvement. Un corps poétique traversé de mots, erratique dans un univers dansant et symbolique. Ce théâtre s’attachera à révéler la douleur d’entre les mots. La montrer sans l’alourdir. D’y creuser pour que jaillissent poésie et beauté.

 

Publié le 3 juin 2019 dans Évènements à la Parole Errante