ANNULÉ Hériter de Bruno Latour face au ravage écologique
Nous consacrerons cette séance du séminaire Devenirs Terrestres à l’œuvre de Bruno Latour en nous demandant comment en hériter face au ravage écologique. Plutôt que nous demander si Latour n’est pas assez à gauche, nous reviendrons sur sa manière propre de penser les problèmes politiques et écologiques contemporains.
Ces dernières années, Bruno Latour s’est fait connaître d’un large public comme un penseur de l’écologie politique, notamment à travers de cours essais. Dans Où Atterrir ?1, les bouleversements climatiques et écologiques nous obligeait à changer de boussole : plutôt que de penser la politique à parti d’un front de modernisation séparant les tenants du progrès et les rétrogrades, nous devions penser nos alliances politiques autours de la polarité entre « Hors-Sol » et « Terrestre », c’est-à-dire entre une négation ou une acception de ce qui nous lie à la vie sur Terre.
La proposition politique que Latour y formulait était poursuivie dans Où Suis-je ?2. Il s’agissait d’un double geste de cartographie et de recomposition : tout d’abord décrire, recenser et reconnaître de quoi dépend très concrètement notre existence, puis, sur cette base, reconsidérer nos obligations, nos alliances et nos ennemis. Ce double geste s’articulait avec un effort conceptuel plus général pour écologiser les concepts classiques de la politique, de la philosophie, et de l’économie, par exemple ceux de « production », d’« individu » ou de « classe »3.
Ces propositions et ces analyses, qu’on pourrait qualifier de véritable tournant pratique dans l’œuvre de Bruno Latour, étaient le fruit d’une réelle préoccupation de la gravité des enjeux climatiques et écologiques. Précisément parce que leur auteur les a formulées dans un souci d’efficacité politiques, elles méritent sans doute d’être éclairées en prenant en compte la durée et l’épaisseur de l’œuvre du philosophe, qui fût également sociologue et anthropologue des sciences et des techniques.
En effet, parmi les nombreuses questions qui mériteraient d’être abordées, nous pouvons nous demander : à quel point l’œuvre de Bruno Latour est-elle compatible avec l’atterrissage qu’il appelait de ses vœux ? Pourquoi ce dernier donne-t-il tant d’importance à la description comme geste fondamentalement politique ? Comment comprendre la figure de l’ennemi politique qui émerge à partir de Face à Gaïa ? Cette dernière est-elle où non compatible avec la conception de la politique latourienne comme un processus de composition toujours à refaire ?
Pour discuter de ces enjeux, nous aurons le plaisir d’écouter Philippe Pignarre et Isabelle Stengers le jeudi 16 février à partir de 19h à La Parole Errante (Espace autogéré d’expérimentations politiques et sociales), 9 Rue François Debergue, 93100 Montreuil.