L’ÉTAT SUR LE BANC DES ACCUSÉS POUR LES BLESSURES AU FLASHBALL DU 8 JUILLET 2009 À MONTREUIL !
Il y a plus de13 ans, la police tirait au Flashball sur des manifestant·es venu·es soutenir les habitant·es expulsé·es d’une ancienne clinique occupée aujourd’hui détruite. Six personnes étaient blessées dont l’une à l’oeil, gravement.
Après dix années de lutte dans la rue et les tribunaux, deux policiers ont finalement été condamnés à des peines symboliques – quelques mois de prison avec sursis, sans interdiction d’exercer ni amende ou indemnité à payer.
Une autre procédure était cependant toujours en cours, devant le Tribunal administratif, visant cette fois non pas à condamner les policiers, mais l’instance qui les recrute, les habille, les forme, et enfin les arme, à savoir l’État.
L’audience aura lieu au Tribunal administratif de Montreuil le jeudi 02 février à 14h.
La récente relaxe aux Assises du policier qui a éborgné Laurent Théron en 2016 rappelle l’impunité judiciaire dont bénéficient les policiers au pénal. Et si seule une procédure pénale peut obliger un policier à justifier ses actes devant une Cour de justice, l’action devant le Tribunal administratif est un recours dont les victimes de la police peuvent se saisir pour faire condamner l’État et obtenir une indemnisation, même lorsque l’identité du policier les ayant blessé·es n’est pas prouvée.
La procédure administrative, plus coûteuse pour l’État qui doit indemniser en euros sonnants et trébuchants les blessé·es, permet aussi de mettre en lumière l’extrême dangerosité des armes de guerre utilisées par la police contre la population, les armes dites intermédiaires – qu’il s’agisse du Flashball, du LBD40, des grenades de désencerclement ou assourdissantes – ayant pris une place centrale dans le maintien de l’ordre en France.
Alors que l’État devra prochainement répondre de nombreuses mutilations perpétrées lors de la répression du mouvement des Gilets jaunes, les tribunaux administratifs ont pris l’habitude d’attribuer aux victimes de la police un certain pourcentage de responsabilité, diminuant d’autant le montant de l’indemnisation accordée. On mesure le cynisme de ces décisions qui rendent responsables les personnes de leur propre blessure pour avoir été au mauvais endroit au mauvais moment, alors même qu’un policier leur a tiré dessus avec une arme de guerre.
En ce début de mobilisation contre la réforme des retraites qui risque fort de se heurter à une répression brutale, nous invitons à vous rendre au Tribunal administratif de Montreuil le jeudi 19 janvier à 13h30, 206 rue de Paris, 93100, Métro Robespierre.
Contact : collectif.huit.juillet@gmail.com
https://collectif8juillet.wordpress.com
Sur le Tribunal Administratif
Sur les audiences et les procédures au Tribunal Administratif: ce texte du collectif « Face aux armes de la police » : https://desarmons.net/2015/05/04/collectif-face-aux-armes-de-la-police/
Désarmons.net a aussi établi un tour d’horizon des recours contre les armes du maintien de l’ordre :
« Plusieurs affaires portées devant les juridictions administratives ont obtenu des décisions favorables :
Le 18 décembre 2013, Clément A. (blessure à la mâchoire) obtient gain de cause devant le Tribunal Administratif de Paris, l’État étant reconnu responsable “sans faute” et astreint à indemniser la victime à hauteur de 7900 + 2000 euros (Décision TA Paris, 17 déc. 2013, n° 1217943/3-1).
Le 9 juin 2015, Guillaume L. (blessure à l’œil) obtient gain de cause devant le Tribunal Administratif de Nice, l’État étant reconnu responsable “sans faute” et astreint à indemniser la victime à hauteur de 17 200 euros (Décision TA Nice, 28 oct. 2014, n° 1202762).
Le 5 juillet 2018, Pierre D. (blessure à l’œil) obtient gain de cause devant la Cour Administrative d’Appel de Nantes, l’État étant reconnu responsable pour “faute dans l’organisation du service” à 90 % et astreint à indemniser la victime à hauteur de 86 400 + 1500 euros (Décision CAA Nantes, 5 juill. 2018, n° 17NT00411).
Florent C. (blessure à l’œil) obtient gain de cause devant le Tribunal Administratif de Montpellier, l’État étant reconnu responsable “sans faute” à 100% et astreint à indemniser la victime.
Un article complet sur Dalloz Actualité revient sur la jurisprudence administrative concernant le Flash Ball. »»
Sur le collectif 8 juillet
« Dans les années 2000 la police a réprimé systématiquement les luttes sociales (mouvement contre le CPE, révoltes dans les banlieues, soulèvements dans les Centres de rétention administratif…). Ces années-là, l’extension de la législation anti-terroriste et la dotation de flash-ball ont été les moyens les plus « spectaculaires » pour criminaliser et terroriser préventivement toute tentative de révolte ou de contestation.
Ces années-là, à Montreuil comme ailleurs, la police occupe la rue. Des opérations organisées par la Préfecture pour traquer les étrangers, dans les transports en commun, aux abords des foyers, répondent aux annonces chiffrées du gouvernement Sarkozy en matière d’expulsion de sans-papiers. Des assemblées de quartier s’organisent alors contre les rafles ; un numéro d’urgence est créé pour intervenir rapidement en cas d’opération policière ; des manifestations ont lieu régulièrement autour des différents foyers de travailleurs migrants. D’autres formes d’entraide et de solidarité existent quotidiennement : occupation de logements vides ; actions collectives contre le contrôle social et administratif ; récup’ et redistribution de nourriture… La confrontation avec la police est de plus en plus fréquente. Les agents de la BAC n’hésitent pas à menacer ou à tirer au Flashball dans les rues de Montreuil.
Fin 2008, une ancienne clinique est occupée en plein centre-ville de Montreuil. Une quinzaine de personnes y habitent. L’immeuble accueille un infokiosque, une cantine, un ciné-club, des permanences d’auto-défense sociales, des concerts, des assemblées, un magasin gratuit et une radio de rue les jours de marché. Le 8 juillet 2009, à 6 heures du matin, la « Clinique » est expulsée. La Préfecture mobilise le RAID et plus de deux cents flics, qui bouclent tout le quartier pendant plusieurs heures. Le soir même, une cantine est installée à une centaine de mètres à l’entrée d’une rue piétonne. A la fin du repas, nous partons en ballade jusqu’à la Clinique. Des policiers arrivent, s’équipent, se mettent en ligne. Alors que nous sommes tous en train de nous éloigner, des rafales de tirs éclatent. L’un d’entre nous tombe à terre. Les flics continuent à pourchasser dans les rues de la ville le reste des manifestants, et à leur tirer dessus. Au total 6 personnes sont touchées, dont 5 à hauteur de visage. »
https://collectif8juillet.wordpress.com/2013/06/09/se-defendre-de-la-police/