Ciné-club Michèle Films#4 / Spectres de nos quotidiens
Mardi 20 juin, 19h30 : projection de Dieu et le Raté de Vincent Le Port, précédé d’un court-métrage surprise (prix libre).
Ouverture des portes 19h30
Début de la projection 20h
Puis vient le jour des révélations de l’Apocalypse, où l’on
comprend qu’on est maudit, et misérable, et aveugle, et nu et alors,
fantôme funeste et dolent, il ne reste qu’à traverser les cauchemars de
cette vie en claquant des dents.
Jack Kerouac
Tout voyageur poursuit un fantôme qui, perpétuellement, lui
échappe ; il espère sans cesse découvrir un nouveau mode de vie qui soit
en quelque sorte fondamentalement différent de ceux qui lui sont
familiers. Il s’imagine capable, dès qu’il la rencontrera, d’entrer
magiquement en contact avec cette existence merveilleuse, de la
comprendre et d’y participer. Dans les endroits que tout le monde
connaît, sur les sentiers battus, il ne trouve jamais ce qu’il cherche.
Aldous Huxley
Nos loisirs nous donnent à moi la liberté d’apprendre, à vous
celle d’enseigner. En conséquence, je voudrais vraiment savoir si vous
croyez que les fantômes existent, ont une forme qui leur appartient en
propre et quelque puissance, ou s’ils sont sans consistance et sans
réalité et ne reçoivent une apparence que de nos frayeurs.
Pline
Avec la tradition gothique et ses multiples ramifications, il est
d’usage de voir dans la manifestation du spectre un phénomène proprement
fantastique, compris comme une rupture dans la texture du banal. Cette
appréhension du fantôme n’a rien de nécessaire : on sait comment, sur
tous les continents, nombre de cultures extra-modernes ont intégré,
notamment sous la forme d’anciens, la spectralité à leurs mythologies ou
récits explicatifs. Dans ces espaces – que l’on trouve ou a trouvé
notamment en Afrique, Asie, Europe méridionale… – le fantôme a un droit
de séjour normalisé dans le quotidien ; ce n’est à l’inverse pas le cas
dans les territoires où règne la modernité occidentale, le plus-là y
étant relégué à une sphère d’extériorité radicale au normal.
Mais ce
n’est bien évidemment pas pour autant que nos quotidiens sont exempts de
spectres divers. Pire, la normalité y étant ce qu’elle est, il
semblerait que nos vies soient de fantastiques génératrices de spectres :
des travailleurs et travailleuses aux sujets surnuméraires, en passant
par les multiples manières d’être séparées, il semble que la métropole
ne soit qu’un vaste mausolée où s’agitent des fantômes. Ces âmes en
peine sont assignées à cette condition (pour elles-mêmes ou pour les
autres), non plus parce qu’elles sont au moins en partie hors du monde,
mais justement car elles font bien trop partie de celui-ci.